D’un secondaire pandémique vers le postsecondaire
Nous étions peut-être naïfs?
Malgré cette rentrée moins qu’idéale, agitée par la peur de la contagion, masquée par les équipements de protection individuelle et freinée par la distance sanitaire, tout bien considéré, les choses ne semblaient pas aller si mal. Nous avions évité l’infiltration de la pandémie dans les écoles avec fermeture immédiate du système d’éducation à la clé. Au bout d’un mois ou à peu près (et grâce aux efforts énormes déployés par le personnel enseignant pour résoudre les problèmes), le modèle d’apprentissage hybride induit par la pandémie semblait fonctionner. Les élèves qui voulaient aller à l’école ont pu le faire et ceux qui préféraient apprendre à distance sont restés chez eux. Certes, tous auraient préféré les journées en classe, sans masque et sans distanciation, mais ce qui s’est produit dans les écoles canadiennes à l’automne 2020 semblait n’être qu’un intermède avant un retour à la normale, quand le vaccin nous aurait apporté l’immunité collective.
Puis la seconde vague a frappé.
Presque au moment où le gouvernement du Canada approuvait les vaccins de Pfizer-BioNTech et de Moderna, la COVID-19 a repris du mordant. À Noël, partout au pays, les gouvernements ont fermé les écoles : l’apprentissage à distance est devenu l’unique voie possible. Les autorités sanitaires y sont allées de projections peu réjouissantes. La COVID-19 a paru reprendre le dessus, tandis que la lente arrivée des vaccins donnait à croire que l’immunisation collective n’était pas envisageable avant la rentrée de 2021-2022. Une saison amère s’annonçait.
Il a fallu revivre ce qui nous avait éprouvés au printemps 2020 : isolement, éloignement, relations virtuelles entre les enseignants et les élèves dont ils sont censés prendre soin. Péripétie plus que désolante, mais nécessaire pour entretenir le continuum d’apprentissage et empêcher la propagation du coronavirus. D’un bout à l’autre du Canada, les services d’orientation ont conjugué leurs forces pour tirer le meilleur parti de la situation. Voici comment ils sont arrivés à faire fonctionner le tout.
Centraliser l’information
École secondaire Clarkson, conseil scolaire de district de Peel
Jim Kinnie, conseiller d’orientation principal à l’école secondaire Clarkson, était heureux de la réouverture des écoles à l’automne 2020 : les membres de son équipe allaient pouvoir déterminer de concert la façon la plus efficace et la plus sûre de servir les élèves. En tête des priorités : fournir aux finissants l’information dont ils ont besoin pour bien choisir leur programme d’études postsecondaires.
À son grand regret, M. Kinnie rapporte qu’à ce moment, le travail se faisait encore uniquement sur plateforme virtuelle, même si ses collègues et lui se trouvaient physiquement à l’école. Les conseillers ne pouvaient pas rencontrer les élèves en personne et tous les rendez-vous ont dû se dérouler par courriel, sur Google Meets, avec MS Teams ou par téléphone. Parmi tous les membres de la communauté de l’éducation qui ont dû s’adapter à ce modèle à distance, les conseillers d’orientation se sont trouvés sur la ligne de front.
À Clarkson, l’une des tâches essentielles a été d’optimiser le recours au système de gestion de l’apprentissage (SGA) choisi, en l’occurrence Brightspace, de la société D2L. Tout ce que les élèves de Clarkson devaient savoir a été affiché sur la plateforme Brightspace de l’école. Puis il a fallu relever un grand défi : la PARTICIPATION. Une fois calmée l’agitation de la rentrée, Jim Kinnie et ses collègues ont entrepris d’aider les finissants à préparer leurs demandes d’admission au collège et à l’université. Or, le téléapprentissage permet aux élèves de se cacherdes enseignants et des conseillers d’orientation qui veulent pourtant leur fournir des renseignements importants. Justement, la plateforme Brightspace est la seule qui analyse les données de manière à montrer les présences. L’équipe des conseillers d’orientation de Clarkson a alors constaté que seuls 20 à 30 p. 100 des élèves suivaient en direct les assemblées d’information virtuelles sur les études postsecondaires. La plupart se contentaient des enregistrements. Le flot de courriels et de messages sur des questions pourtant traitées en long et en large aux assemblées a commencé à susciter l’inquiétude.
Garnir sa bibliothèque
St. Marcellinus, conseil scolaire de district catholique Dufferin-Peel
Pendant ce temps, à quelques encablures de Clarkson, Anna Macri et Jason Arsenault, tourmentés par les mêmes inquiétudes que Jim Kinnie, signalent quelques développements étonnants. St. Marcellinus a aussi fait le choix des assemblées virtuelles pour renseigner ses élèves sur les établissements et les programmes postsecondaires. On a d’abord utilisé Google Meets, mais la toute première présentation en direct a été sabotée par quelques trublions d’une autre école. D’où la décision de proposer des présentations enregistrées, suivies d’une période de questions en direct pour les élèves désireux d’obtenir des explications approfondies. Parents et élèves sont dirigés vers les présentations réelles sur Google Classrooms grâce à des liens diffusés par l’intermédiaire de Twitter et du site Web de l’école. Selon Anna Macri et Jason Arsenault, c’est la bonne solution. Dès que les conseillers maîtrisent la technique de l’enregistrement vocal hors champ avec un logiciel comme PowerPoint, il leur est facile de reproduire la technique pour de nouvelles présentations ou d’apporter des changements en vue d’une utilisation future. Ils pensent adopter la même méthode pour le choix de cours. Mme Macri, directrice du service, est en train de constituer une bibliothèque virtuelle de présentations que les élèves pourront regarder toute l’année. Dès qu’il reçoit une information, le service d’orientation en avise les élèves sur leur téléphone. Imaginez le concert de sonneries pour les membres d’un service qui emploie ainsi des technologies de communication de pointe…
Restons simples
École secondaire Woodstock – District scolaire Anglophone West, Nouveau-Brunswick
Tim Wright, conseiller d’orientation principal à l’école secondaire Woodstock, jugeait important d’adopter la vision la plus simple dans les circonstances : renseigner les élèves de la manière la plus claire et la plus commode possible. C’est d’ailleurs la philosophie qui les guidait, lui et nombre de ses collègues dès avant la pandémie. Son choix? Il était prêt à employer toute plateforme efficace, dont Brightspace et Google Classroom, mais il attribue surtout aux réseaux sociaux le succès des communications entre l’école et les élèves. Au printemps 2020, quand il est apparu que la poursuite des cours reposait entièrement sur la technologie, une élève de Woodstock a créé une page Facebook et une page Instagram à l’intention de ses camarades de la fin du secondaire. Les autres plateformes sont efficaces, mais rien ne vaut la portée de ces deux réseaux. L’élève qui souhaite regarder une présentation sur les demandes d’admission ou les bourses d’études affiche sa demande sur les réseaux sociaux et se connecte à des plateformes où il trouvera des PowerPoint, des fiches d’information, des présentations en direct et des conseils sur la transition entre le secondaire et le postsecondaire. Selon Tim Wright, le processus fonctionne très bien et comme les élèves ont été obligés d’adopter un style d’apprentissage plus autonome, ils s’adaptent de plus en plus facilement et deviennent plus résilients, ce qui augure bien de leur passage au collège, à l’université et au monde du travail. Il souligne l’apport des collèges et des universités, qui ont aussi adopté l’échange d’informations à distance. Les établissements d’enseignement postsecondaire ont remplacé les visites sur place par des vidéos de courte durée, que les élèves peuvent consulter par l’intermédiaire de la vidéothèque du SGA de l’école.
Des rendez-vous simplifiés
École secondaire Holy Name of Mary – Conseil scolaire de district catholique Dufferin-Peel
Kristine Aguirre, conseillère d’orientation, met abondamment en valeur le travail de ses collègues, mais sa façon de le faire ouvre une fenêtre sur l’avenir. Kristine Aguirre est bien ancrée dans le présent et prend les choses au jour le jour, mais elle entrevoit les avantages de tout ce que ses collègues et elle ont appris et assimilé en matière de technologie. Elle souligne particulièrement l’utilité de Google Forms, que le service d’orientation utilise pour répondre aux élèves. Quand ceux-ci ont besoin des services d’un conseiller (pour se renseigner sur un collège ou une université, par exemple), ils se connectent à Google Classroom et écrivent leur question sur un formulaire (Google Forms) en indiquant comment communiquer avec eux pour leur fournir la réponse. Mme Aguirre travaille tous les jours de cette manière et réussit en général à répondre rapidement, pratiquement comme elle le faisait quand les élèves prenaient rendez-vous et qu’elle les recevait en personne. C’est ce qui l’incite à envisager l’après-pandémie. En septembre prochain, quand les élèves et le personnel auront été vaccinés et que l’apprentissage pourra de nouveau avoir lieu en classe, elle compte bien conserver le système des formulaires Google, que les élèves continueront à utiliser pour poser leurs questions sur les cours, l’enseignement postsecondaire et la vie scolaire, et les acheminer directement aux conseillers dès qu’ils en sentiront le besoin. Les conseillers pourront ainsi prioriser les demandes et proposer un rendez-vous ou répondre par courriel, selon les préférences des élèves. Il y aura donc moins d’heures de cours manquées, ce qui représente un net avantage pour les élèves comme pour les professeurs.
L’avenir
Dans le monde d’après la pandémie, les services d’orientation auront changé d’allure. Il faut s’attendre à un nouveau modèle, hybride, qui mariera la technologie apprise par la force des choses aux habiletés que les conseillers ont acquises au fil d’une carrière plus traditionnelle. Cette convergence souligne à quel point il importe que les conseillers puissent communiquer de manière plus complète et plus claire.
Les diplômés
L’objectif de toute école est de guider les élèves jusqu’à la fin du programme et au diplôme, histoire de les préparer au prochain chapitre de leur vie. Toutes les technologies que les conseillers d’orientation ont appris à maîtriser en une année peuvent maintenant être mises à profit dans cette optique. On l’a vu : des bibliothèques de présentations, des fiches d’information, des guides et des calendriers ont été créés à l’intention des élèves (et des parents curieux), qui peuvent les consulter en tout temps, souvent grâce à des liens entre le site Web ou les comptes des réseaux sociaux et le SGA de l’école. La technologie facilite les conversations entre élèves et conseillers sur diverses questions comme les établissements et les programmes d’études postsecondaires. L’apprentissage à distance fait encore craindre le risque d’un écart de compétences, mais nos élèves de l’ère pandémique acquièrent une capacité d’adaptation et une résilience qui les serviront bien, peu importe la voie qu’ils choisiront après leurs études secondaires.
* Quelques mots sur les SGA
Il se peut fort que vous utilisiez déjà ce type de plateforme sans parler de « technologie des SGA ». Toutefois, maintenant que nous voici plongés bien profondément dans le monde de l’orientation et de la consultation à distance, il est important : a) d’exploiter le plein potentiel de votre SGA; et b) de choisir le SGA qui répond le mieux à vos besoins. Ainsi, Google Classroom (qui est gratuit!) est certes très utile, mais Moodle (payant) fournit des outils et des données qui serviront sans doute encore mieux votre école. Pour en apprendre davantage sur les SGA les plus courants, consultez l’article de PC Magazine intitulé « The Best (LMS) Learning Management Systems » [en anglais], à l’adresse https://www.pcmag.com/picks/the-best-lms-learning-management-systems.
En prévision du prochain numéro de Canadian School Counsellor, nous cherchons des élèves dont l’expérience en temps de pandémie s’est soldée par un beau succès. Pouvez-vous nous aiguiller vers certains de vos élèves pour lesquels l’aventure se passe bien ou nous faire part d’un récit de ce genre? Écrivez-nous, à l’adresse canadianschoolcounsellor@gmail.com. |
Par Sean Dolan